© Damien Sevrin
Milieu pauvre, vie riche
Quel est le secret de cette étonnante richesse biologique ? Cela tient naturellement au contexte géologique et hydrologique. Mais également à une histoire –qui est aussi la nôtre, nous raconte Tom Baudoux.
« Les conditions sont très contraignantes, avec des périodes de grande humidité et des périodes de sécheresse », explique-t-il. « La nappe fluctuante inonde régulièrement le lit majeur de l’Eau Blanche. » Ce contexte a favorisé des conditions oligotrophes (pauvres en nutriments), favorables à une plus grande diversité biologique. « Milieu pauvre, vie riche ! », résume Tom.
« Durant de très nombreux siècles, la réponse apportée par les habitants a été l’élevage extensif. Le bétail y pâturait en début de saison, quand l’herbe est encore tendre et verte. Puis, à l’été, une fauche permettait d’engranger le foin. Suivant les années, une seconde fauche était effectuée en fin de saison, ou bien on pâturait encore un peu au regain. Enfin, avant l’hiver, on répandait les fonds du grenier, jonchés des graines tombées du foin de l’année précédente. » Ainsi courait le cycle de la vie.
« Nos professeurs en conservation, ce sont les agriculteurs d’autrefois » «
Tom Baudoux
Ne cherchez pas plus loin : c’est ce modèle traditionnel qui guide nos spécialistes pour la gestion écologique de ces milieux ouverts ! « On n’a rien inventé : nos professeurs, ce sont les agriculteurs d’autrefois », sourit Tom Baudoux. « Fauche tardive, seconde fauche éventuelle, re-semis de graines indigènes : c’est la recette d’une bonne gestion. » Voilà qui nous rappelle que, Durant des millénaires d’une histoire partagée, la biodiversité et les humains ont avancé main dans la main.
En Fagne : un îlot de bocage préservé !
De manière générale, la situation des prairies maigres est très dégradée. Un tiers des prairies permanentes ont disparu, et moins de 5% de celles qui ont subsisté sont en bon état de conservation. Les causes principales : l’urbanisation, le labour et l’intensification agricole. Mais pas question de baisser les bras… surtout quand on possède sur son territoire un magnifique échantillon de bocage préservé. Rendre à ce paysage sa beauté et laisser la nature s’y épanouir, c’est un des projets emblématiques du Parc national et de ses partenaires. Lors des décennies précédentes, deux projets « LIFE », financés par l’Union européenne, ont permis d’entamer un important travail. Le Parc national s’inscrit dans leur sillage et entend amplifier leurs acquis. « La dynamique partenariale du Parc national permet de donner un coup d’accélérateur dans la pérennisation de l’écosystème à l’échelle régionale », résume Tom.« Durant des millénaires, l’histoire des humains et celle de la biodiversité ont marché main dans la main » «
Tom Baudoux
Des mares, on n’en a jamais assez…
Outre les réouvertures et restaurations de prairies (voir encadré), le Parc national travaille, avec Natagora, à l’extension du maillage écologique. Tom Baudoux : « le Parc national finance des plantations de haies et de vergers hautes tiges, favorables à des espèces telles que le grand rhinolophe et la chouette chevêche ». Les éléments du maillage écologique forment la trame vitale du bocage. « Insectes, oiseaux, amphibiens, micromammifères y trouvent le gîte et le couvert, mais aussi des sites pour nicher ou hiverner ».
Dans les prochains mois, c’est surtout la création de mares agricoles qui va connaître un boom important… « Plus de 30 mares seront creusées cet automne et l’hiver prochain. L’objectif initial de 25 mares est dépassé, et nous avons déjà des contacts qui permettent d’envisager de le doubler », se réjouit Tom.
© Parc national ESEM
Les restaurations de prairies en 2024-2025 :
De 8,5 à 14,5 ha de prairies seront restaurés d’ici le printemps prochain, à Couvin et Chimay. 50 hectares en tout d’ici 2026…
Trois situations peuvent se présenter :
- Prairies en état de conservation moyen : dans ce cas, un changement ou une simple adaptation des méthodes de gestion est engagé.
- Prairies (fortement) dégradées : si le cortège végétal a disparu, des graines sont importées depuis un habitat identique en bon état de conservation, situé dans la région. Le semis est réalisé après fraisage.
- Surfaces reboisées avec des essences exotiques (généralement épicéa) : une étape préalable d’abattage, dessouchage et raclage est nécessaire. Ce type de restauration permet de rendre à l’agriculture des milieux perdus en réduisant un couvert arboré de faible intérêt biologique.
Source : Forêt et naturalité.
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