Des agriculteurs et agricultrices démontrent chaque jour que l’élevage peut apporter des effets positifs pour la biodiversité, le climat, notre santé et le bien-être de la société. Petit tour d’horizon de ces pratiques, mises en valeur par le Parc national et ses partenaires adhérents…
On pense souvent que l’élevage a un impact négatif sur le climat et l’environnement. Et c’est vrai dans la grande majorité des cas, par exemple quand il nécessite des déforestations ou qu’il concentre beaucoup de bêtes sur une surface réduite (élevage intensif). Il faut alors importer les aliments du bétail ou utiliser de grandes surfaces agricoles pour les produire.
Heureusement, il existe des pratiques d’élevage qui non seulement ont un impact réduit ou nul sur le climat et les écosystèmes, mais qui peuvent aussi apporter des services tels que le stockage du carbone, la préservation d’une biodiversité propre aux milieux ouverts, une meilleure rétention de l’eau pluviale ou encore des qualités gustatives et nutritionnelles supérieures dans nos assiettes.
Passons en revue ces modes d’élevage « nature-compatibles »…
1. Pâturage extensif : le bon dosage
Par opposition au pâturage intensif, le pâturage extensif limite le nombre de bêtes sur une surface donnée. Si vous aimez les chiffres, sachez que chez nous, la limite est fixée à 1,4 « UGB » (Unité Gros Bétail : soit une vache ou équivalent, p.ex. : 10 moutons) par hectare. On parle aussi d’élevage en « faible charge » car il s’agit de réduire la charge supportée par l’environnement.
Ce mode d’élevage présente deux avantages importants. D’une part, il permet l’autonomie fourragère, c’est-à-dire que le fermier ou la fermière ne doit (pratiquement) pas acheter de foin et d’aliments à l’extérieur, ses prairies suffisant à nourrir le bétail. D’autre part, il préserve la diversité et la spontanéité des milieux ouverts. Des prairies diversifiées, pas ou peu enrichies en engrais et espèces végétales productives, accueillent en effet un vaste cortège de plantes, insectes, oiseaux, champignons…
2. Écopâturage : la « tondeuse écologique »
Le terme écopâturage couvre diverses situations (dont certaines décrites ci-dessous). Prenons l’exemple du « pâturage tournant » : les animaux sont déplacés d’une parcelle à l’autre au fil des saisons, de manière à maintenir des milieux ouverts. Pour le dire simplement : c’est une sorte de tondeuse écologique…
Du point de vue de l’éleveur ou l’éleveuse, c’est un moyen peu coûteux de nourrir le bétail, souvent des moutons ou des chèvres, qui s’accommodent de milieux pauvres et de reliefs pentus. Du point de vue des naturalistes qui veillent sur les milieux ouverts protégés, ce pâturage dit « intermittent » assure l’entretien de réserves naturelles sans devoir recourir à des instruments mécaniques. Tout le monde est content !
3. Pâturage itinérant : le retour de la tradition
Si vous connaissez un peu notre parc national, vous en avez forcément entendu parler… L’un de nos projets emblématiques est la création d’un troupeau de centaines de moutons qui sillonnera les collines de Calestienne au fil des saisons, sous la houlette de bergers accompagnés de chiens.
Le pâturage itinérant permettra d’entretenir les précieuses pelouses calcicoles et leurs orchidées sauvages, qui font la fierté de la région. C’est donc un cas particulier de l’écopâturage (cf. ci-dessus) qui ne requiert pas (ou peu) de transport motorisé. Autre atout du pâturage itinérant : il apporte un bénéfice culturel et économique, en redonnant vie à des traditions locales et en créant des opportunités de reconnexion aux bêtes et à la nature à travers des activités pédagogiques et touristiques, sans compter les opportunités liées au développement des filières laine, lait et viande.
Premier déplacement en itinérance du troupeau de moutons du Parc national de l’Entre-Sambre-et-Meuse
4. Pâturage naturel : l’élevage en immersion
Des bêtes rustiques (résistantes aux conditions climatiques locales), en général des bovins ou des chevaux, sont laissées en (semi-)liberté dans de vastes espaces naturels non gérés. Autrement dit : on crée les conditions pour permettre à des dynamiques naturelles de se remettre en place avec la présence de grands herbivores, à l’instar de ceux qui peuplaient autrefois notre continent (aurochs, bisons, buffles, chevaux…).
Est-ce encore de l’élevage ? Oui, car des acteurs humains placent délibérément ces animaux dans un espace circonscrit. De plus, des bêtes sont prélevées occasionnellement pour éviter une surcharge de bétail et prévenir les impacts négatifs sur la biodiversité. C’est donc une étape intermédiaire entre gestion par pâturage et réensauvagement du milieu…
Au-delà du pâturage ? La forêt en libre évolution.
Jusqu’ici, on a envisagé des formes de pâturage qui tendent à se rapprocher de plus en plus des dynamiques naturelles des écosystèmes. Lorsqu’on pousse cette logique à son terme, on aboutit aux principes de la « libre évolution », qui consistent à laisser la nature s’adapter et se réguler par elle-même. Ce sont ces principes qui sont appliqués par le Département de la Nature et des Forêts et le Parc national de l’Entre-Sambre-et-Meuse dans ses 1.700 hectares de Réserves biologiques intégrales et ses 14.500 hectares de forêts gérées de manière douce, où l’on laisse davantage de bois mort et d’arbres-habitats (en savoir plus).
Le but ? Créer des forêts plus complexes, plus résilientes et plus accueillantes pour la faune sauvage. Dans ces forêts, on retrouve peu à peu des processus naturels qui incluent des herbivores et aussi parfois des grands prédateurs, et cette fois, les rôles ne sont plus joués par les humains et leur bétail. Mais ça, c’est une autre histoire…
Comment le Parc national met-il l’élevage au service de la nature ?
- Pâturage extensif : les agriculteurs et agricultrices adhérant au Parc national signent une charte dans laquelle la faible charge en bétail est un critère essentiel (au même titre que le bio).
- Éco-pâturage : en saison, des éleveurs locaux stationnent leurs moutons sur des pelouses sèches précieuses du Parc national.
- Pâturage itinérant : le troupeau et la bergerie du Parc national redonnent vie à une tradition locale qui a façonné nos paysages.
- Pâturage naturel : des recherches sont menées pour identifier une zone favorable de minimum 30 ha, afin de réaliser cet objectif.
© Laurent Malbrecq
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