Prochainement, des vestiges celtes seront mis en valeurs dans nos forêts. Mais saviez-vous que notre territoire regorge de traces d’occupation anciennes, depuis les premiers pas de Néandertal jusqu’aux raffinements ultimes des villas gallo-romaines et des sanctuaires tardifs ? Un musée rassemble tous ces trésors, à Treignes.
Cherchez l’erreur… Par définition, un parc national ne comporte que des espaces naturels ou semi-naturels. Pourtant, notre territoire a dévoilé des traces de toutes les grandes étapes de la Préhistoire et de l’Antiquité, depuis les Néandertaliens jusqu’aux Gallo-Romains, en passant par les Celtes de l’Âge du Bronze et de l’Âge du Fer.
Ce paradoxe n’est qu’apparent. Il témoigne que les humains et la nature vivent une relation intime depuis toujours. Et les peuples qui se sont succédé dans ces décors sauvages savaient combien leur vie dépend du monde qui les entoure.
Les monts et vallées de Fagne, d’Ardenne et de Calestienne ont enregistré le passage des humains, leur ingéniosité, leurs cultes, leurs douleurs, leur respect pour leurs dieux et pour la nature. Depuis 1984, le Musée du Malgré-Tout, à Treignes, rassemble les trésors glanés dans notre région par de nombreux archéologues lors de fouilles organisées par l’équipe scientifique de l’institution. Nous l’avons visité pour vous. Une excursion entre nature et culture, à la découverte de notre passé et de notre territoire…
Les premiers humains en Entre-Sambre-et-Meuse : chasseurs du froid
Les premières traces de peuplement humain dans l’Entre-Sambre-et-Meuse datent de plus de 100 000 ans. C’est au Trou de l’Abîme, à Couvin (1), qu’un site paléolithique a été mis au jour. Ce site était fréquenté il y a environ 50 000 ans par des Néandertaliens, qui ont précédé Homo sapiens en Europe (les deux populations ont ensuite cohabité durant plusieurs millénaires). Il s’agit probablement d’une halte de chasse, comme en témoignent les nombreux ossements, pointes de projectiles et racloirs découverts. Les esquilles de silex témoignent d’une activité d’affûtage des pierres usées ou cassées, car le silex est absent de la région.
Qui dit chasse, dit faune sauvage. Et même : grande faune. Au Pléistocène, période marquée par des glaciations entrecoupées d’épisodes plus doux, le paysage se résume à une vaste steppe, arpentée par des mammouths, des rhinocéros laineux, des rennes, des bouquetins, des chevaux, des bisons ainsi que de terribles prédateurs comme le lion et l’ours des cavernes.
C’est au cours de cette période froide que sapiens – alias Cro-Magnon – s’installe dans notre région. On le repère à ses outils plus légers et diversifiés, incluant des pièces travaillées en os et en bois de cervidé. Certains de ces ustensiles ont été mis au jour au Trou du Poilu, à Petigny (2). De l’art figuratif – grande invention d’Homo sapiens – a été découvert non loin de chez nous, à Roc-la-Tour (Ardennes françaises).

Crâne d’ours @Musée du Malgré Tout
Nouveau climat, nouveaux modes de vie
Tout change avec la modification profonde qui s’enclenche il y a 12.000 ans. Les paysages se transforment, se couvrant peu à peu de forêts tempérées. Des espèces telles que le mammouth, le rhinocéros laineux et le renne disparaissent de la région. Les sangliers, cerfs et chevreuils prennent possession des lieux. Les techniques de chasse évoluent alors : l’arc et la flèche prennent le pas sur le propulseur et la sagaie. On en trouve des traces à Scourmont, près de Chimay (3).
Mais c’est un chamboulement bien plus grand encore, d’origine culturel cette fois, qui affecte bientôt la vie des humains. La domestication d’espèces sauvages donne naissance à nos cochons, vaches, moutons et chèvres. Venus du Proche-Orient, l’agriculture et l’élevage se répandent et les humains se sédentarisent, abandonnant leurs habitudes nomades, bien que chasse et cueillette demeurent des activités du quotidien. L’agriculture transforme aussi les paysages. C’est le Néolithique. Dans notre région, les premières traces de ce nouveau mode de vie sont relativement tardives, et datent du 4e millénaire, comme à Olloy-sur-Viroin.
Du bronze au fer, l’âge des Celtes
Apparue chez nous au cours du deuxième millénaire avant notre ère, la métallurgie est un élément crucial de l’archéologie antique, car elle a laissé des traces plus durables que la poterie et le travail du bois. Des vestiges de l’Âge du Bronze (-1800 à -800) ont notamment été collectés sur plusieurs sites funéraires : la Terre de David à Olloy-sur-Viroin (4) le Franc-Bois à Fagnolle et la Roche Albéric à Couvin (1). Ce site a dévoilé un dépôt remarquable d’objets en bronze, mais aussi des dépôts de poterie plus tardifs, datés de l’Âge du Fer récent (période dite de La Tène : -475 à +20).
On appelle Celtes, ou Gaulois, les peuples qui vivaient dans nos régions avant l’arrivée des Romains. C’est de la fin de l’Âge du Fer que datent les trois fortifications celtes qui seront prochainement mises en valeurs dans des forêts du Parc national (voir carte). Ces sites défensifs indiquent que la bordure nord de la Calestienne dessinait probablement une frontière entre les Rèmes, qui occupaient notre territoire et des nations voisines, potentiellement rivales.

Des dieux et des arbres
Parmi les pièces les plus remarquables visibles au Musée du Malgré-Tout, vous apprécierez certainement une statue imposante d’une divinité nommée Iverix (photo). Ce menhir est gravé à l’effigie du dieu, dont le nom signifie le « Roi if ». L’œuvre témoigne de l’importance accordée aux arbres dans la culture celte. L’if est un arbre indigène, aujourd’hui protégé dans le Parc national.
Outre l’admiration et le respect qu’ils vouaient aux arbres, les Celtes possédaient des mythes étonnants qui dévoilent une vie sociale riche, où les femmes pouvaient occuper des positions éminentes, à l’égal des hommes. Mais cela, c’est une autre histoire. On vous la racontera une prochaine fois.

Statue imposante d’une divinité nommée Iverix. @Musée du Malgré Tout
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