
L’Eau Noire est une rivière aux eaux fraîches et pures qui sillonne le sud du Parc national, sous les frondaisons ardennaises. La perle, elle, est un insecte délicat qui fréquente les eaux de haute qualité biologique. L’Eau Noire et la perle étaient donc faites pour se rencontrer. Frédéric Mouchet, du Contrat de rivière Haute Meuse, nous en apprend davantage sur cette espèce bioindicatrice et le projet de labellisation de l’Eau Noire.
Au sud de Couvin, un ruban d’argent serpente sous une épaisse forêt de feuillus. C’est l’Eau Noire, l’un des joyaux du Parc national de l’Entre-Sambre-et-Meuse. Ici, on n’observe aucune trace d’artificialisation. Aucune activité humaine n’atteint cette portion de la rivière, si ce n’est, de temps en temps, les allées et venues de quelques spécialistes équipés de bottes. C’est l’équipe du Contrat de rivière Haute Meuse (CRHM), qui remue les fonds caillouteux à la recherche d’un mystérieux trésor.
Des petites bêtes qui nous en apprennent beaucoup
Dans leurs filets : de menus poissons et un assortiment d’étranges petits arthropodes. L’un d’eux retient l’attention de Frédéric Mouchet, Coordinateur du CRHM. Les visages de Frédéric et de ses collègues s’éclairent : « C’est une perle ! » Et voici pourquoi elle mérite bien son nom. « Les perles sont une famille d’insectes, dont le nom savant est ‘plécoptères’ », commente Frédéric. « Leurs larves sont aquatiques et ont la particularité de se développer uniquement dans le lit des rivières de très haute qualité biologique. Leur présence dans nos filets est donc une excellente nouvelle ».
Lorsqu’une rivière abrite des perles, on sait qu’elle accueille également tout un cortège d’espèces qui s’épanouissent dans les rivières aux eaux pauvres en nutriments et en bon état de conservation. « On y retrouve typiquement la truite, mais aussi d’autres poissons comme le chabot ou la loche franche, ainsi qu’une faune variée de macro-invertébrés », précise Frédéric.
C’est pourquoi on dit que la perle est une espèce « bioindicatrice » : elle nous renseigne sur la santé d’un écosystème. Et elle n’est pas la seule à jouer ce rôle aux yeux des scientifiques. Frédéric Mouchet détaille le contenu de ses filets : « nous avons récolté des larves d’éphémères, mais aussi des larves de trichoptères (très appréciées par la truite) et de libellules. Toutes ces espèces d’insectes sont indicatrices de la qualité de l’eau. En fonction du nombre d’individus de chaque groupe d’espèces, on calcule un indice biotique, de 1 à 20, qui permet d’estimer la qualité générale du cours d’eau : mauvaise, moyenne ou bonne. Les perles comptent parmi les plus exigeantes de toutes ces espèces bioindicatrices, c’est pourquoi leur présence est toujours un très bon signe. »

Par sa seule présence, la perle (ici une espèce non identifiée) témoigne de l’excellente qualité biologique de la rivière.
L’Eau Noire pourrait-elle prétendre au prestigieux label « Site Rivières Sauvages » ?
L’inventaire réalisé par Frédéric et son équipe témoigne de la situation exceptionnelle dans la portion ardennaise de l’Eau Noire, en amont de Couvin. C’est ce tronçon que le Parc national de l’Entre-Sambre-et-Meuse a l’ambition de faire labelliser « Site Rivières Sauvages ». Un honneur qu’aucune rivière belge n’a obtenu à ce jour.
« Ce label d’origine française est associé à des cours d’eau qui traversent des régions exemptes de toute influence humaine. Les critères sont extrêmement stricts et très peu de rivières peuvent y prétendre dans nos régions », explique Frédéric. Le CRHM est mandaté par le Parc national ESEM pour effectuer les inventaires et analyses préalables, mais aussi pour réunir les acteurs concernés (services publics régionaux, communes, pêcheurs, forestiers…) en vue de prendre les mesures nécessaires à la conservation ou la restauration de l’Eau Noire, et tenter d’obtenir le prestigieux label.
Pour que les perles continuent à grouiller dans le lit de l’Eau Noire.

L’équipe du Contrat de rivière Haute-Meuse, en présence de Sébastien Lezaca (Parc national ESEM) et Adrien Joveaneau (RTBF).
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